TAVI, MitraClip, chirurgie mini-invasive… le point sur les dernières avancées dans le traitement des valvulopathies

Vincent Richeux

19 janvier 2021

 
 

Elargissement du TAVI (Le TAVI (Transcatheter Aortic Valve Implantation) est l’implantation d’une valve aortique biologique par voie percutanée, c’est-à-dire sans ouvrir le thorax) aux patients à bas risque chirurgical, remboursement du MitraClip dans l’insuffisance mitrale primaire, hausse de la chirurgie mini-invasive sur valve mitrale, qui pourrait aussi être remplacée par voie percutanée… Le traitement des valvulopathies est actuellement en pleine mutation. Deux cardiologues ont exposé les changements majeurs lors des Journées Européennes de la Société Française de Cardiologie (JESFC2021), qui se sont déroulé cette année sous forme virtuelle.

Avec l’élargissement des indications du TAVI, « nous assistons à une véritable révolution dans le traitement du rétrécissement aortique », a commenté le Pr Martine Gilard (CHU de Brest), lors de sa présentation, pendant laquelle la cardiologue a retracé l’évolution remarquable des techniques percutanées sur valve aortique, mais aussi sur valve mitrale avec le développement du MitraClip.

Près de 20 ans après la pose du premier TAVI par l’équipe du Pr Alain Cribier, au CHU de Rouen, la technique devrait, en effet, devenir un traitement de premier choix pour de nombreux patients atteints d’une valvulopathie aortique. Au départ réservé aux cas de sténose aortique non opérable, le TAVI a été validé chez les patients à risque chirurgical intermédiaire puis, récemment, chez les patients à faible risque, une étape marquante en cardiologie interventionnelle.

« Changement de paradigme »

Pour rappel, les résultats positifs chez les patients à bas risque ont été rapportés fin 2019 dans les essais PARTNER-3 et Evolut Low Risk. Dans PARTNER-3, le TAVI s’est même avéré nettement supérieur à la chirurgie sur le critère primaire d’évaluation associant mortalité, AVC et réhospitalisation à un an (8,5% des patients contre 15,1% chez ceux implantés par chirurgie).

 

Ces essais randomisés ont également montré une diminution de la durée d’hospitalisation, un taux de complications réduit et une récupération plus rapide des performances physiques, ce qui s’est traduit par une amélioration plus nette de la qualité de vie, par rapport aux patients à bas risque traités par chirurgie.

Le TAVI étant désormais indiqué pour la grande majorité des patients, nombreux sont ceux qui évoquent « un changement de paradigme », avec une chirurgie qui se retrouverait reléguée comme option de second choix. Il faudra attendre l’actualisation des recommandations de l’European Society of Cardiology (ESC), prévue pour 2021, pour voir cette extension d’indication officialisée.

Comme nous l’indiquait le Pr Bernard Iung (hôpital Bichat-Claude Bernard, AP-HP, Paris), dans un entretien au congrès ESC2019 , cet élargissement des indications a déjà été mis en pratique chez les patients plus âgés classés à bas risque. « Après 80 ans, beaucoup d’équipes favorisent le TAVI en première intention, même si ce n’est pas encore recommandé. »

Le TAVI autorisé sur bicuspidie

Selon le Pr Thierry Folliguet (Hôpital Henri Mondor, AP-HP, Créteil), qui est intervenu lors de ces eJESFC pour faire le point sur les actualités marquantes de 2020 dans le domaine des valvulopathies, « on peut maintenant se demander si le TAVI ne va pas devenir le traitement de première intention pour tous les patients » . La chirurgie serait alors envisagée uniquement en cas de contre-indication au TAVI.

 

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Des lésions cardiaques en post-COVID laissent présager d’une insuffisance cardiaque ultérieure

Steve Stiles

3 août 2020

Allemagne — Dès le début de l’épidémie, il est apparu que le cœur des patients hospitalisés pour Covid-19 pouvait être atteint, en particulier chez ceux souffrant déjà d’une maladie cardiovasculaire (CV) ou présentant des facteurs de risque.

En revanche, jusqu’ici les études de cas et les petites séries disponibles ne permettaient pas de savoir si le SARS-CoV-2 attaquait directement le cœur et si les effets cardiaques aigus de la maladie pouvaient induire une cardiomyopathie persistante.

Les éléments de réponse qu’apportent deux nouveaux rapports publiés le 27 juillet dans le JAMA Cardiology ne sont pas pour rassurer. Il semble que le virus puisse infecter le myocarde, sans nécessairement provoquer de myocardite, et que certains patients, même légers, gardent des lésions myocardiques et une inflammation qui pourraient induire une insuffisance cardiaque à plus long terme.

Une inflammation cardiaque persistante même chez les malades « légers »

Une étude de cohorte prospective de 100 patients guéris d’un récent épisode de la maladie a montré à l’IRM cardiaque des signes de dysfonctionnement ventriculaire, une plus grande masse ventriculaire et, dans 78% de la cohorte, des signes d’inflammation myocardique. Les résultats de l’imagerie étaient corrélés aux élévations de la troponine T ultra-sensible (hs-TnT).(voir encadré en fin d’article).

 

Les deux tiers de la cohorte, dont la gravité de la maladie Covid-19 s’étalait « d’asymptomatiques à symptômes légers à modérés », s’étaient rétablis à domicile, tandis que les autres «patients gravement malades» avaient été hospitalisés, écrivent les auteurs, menés par le Pr Valentina O. Püntmann, Hôpital universitaire de Francfort, Allemagne.

Aucun des patients n’avait d’antécédents d’insuffisance cardiaque ou de cardiomyopathie, bien que certains souffraient d’hypertension, de diabète ou de signes de maladie coronarienne.

« Nos résultats montrent que les participants sans antécédents de maladie cardiovasculaire, qui s’étaient rétablis à leur domicile, avaient une inflammation cardiaque fréquente, qui était similaire au sous-groupe hospitalisé en termes gravité et d’étendue », indique l’équipe.

« Il y a une inflammation myocardique considérable dans le muscle cardiaque des semaines après la guérison de la maladie Covid-19. Cette découverte est importante car elle pourrait signifier un fardeau considérable d’insuffisance cardiaque dans quelques années », a déclaré le Pr Püntmann à theheart.org | Medscape Cardiology.

Un diagnostic précoce offrirait « l’opportunité qu’un traitement précoce puisse limiter l’évolution des lésions inflammatoires ou même l’arrêter », a-t-elle déclaré.

Il y a une inflammation myocardique considérable dans le muscle cardiaque des semaines après la guérison de la maladie Covid-19 Pr Valentina O. Püntmann

« Le diagnostic relativement aisé de la maladie Covid-19 offre une opportunité, que nous n’avons souvent pas avec d’autres pathologies, de prendre des mesures proactives et de rechercher une atteinte cardiaque tôt, quelques semaines après la guérison ».

Les observations à l’IRM d’œdème inflammatoire, de cicatrices et d’épanchement péricardique font partie des « principaux critères de diagnostic de la myocardite inflammatoire et virale», souligne le Pr Biykem Bozkurt, Baylor College of Medicine, Houston, qui n’a pas participé aux études.

 

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COVID-19 : plus de complications cardiovasculaires inflammatoires chez les jeunes adultes

Aude Lecrubier

19 janvier 202

Les jeunes adultes hospitalisés pour Covid-19 ont-ils un profil de complications cardiovasculaires qui diffère de celui des patients moins jeunes ? Cette question a fait l’objet d’une présentation poster lors des Journées Européennes de la Société Française de cardiologie (e-JESFC) qui se sont déroulées en ligne entre le 15 et le 17 janvier 2021.

« Depuis le début de la pandémie de Covid-19, une idée généralement admise est qu’elle concerne principalement les patients âgés et épargne les sujets plus jeunes. Néanmoins, les séries descriptives publiées de part le monde ont montré qu’une part non négligeable des patients hospitalisés étaient des sujets jeunes. De plus, il est maintenant bien établi que l’impact du SARS-CoV-2 sur le système CV est fréquent et polymorphe avec des lésions myocardiques directes et indirectes, des événements thrombotiques, de l’insuffisance cardiaque, des myocardites et des péricardites », a rappelé Antonin Trimaille, interne au CHU de Strasbourg en préambule de sa présentation.

Pour tenter de mieux comprendre d’une part le pronostic des adultes jeunes hospitalisés pour Covid-19 et les complications CV dont ils souffraient, l’équipe du CHU de Strasbourg a réalisé une étude observationnelle rétrospective qui a colligé les données de patients hospitalisés dans des services conventionnels pour Covid-19 (RT-PCR positive) de 24 centres français entre le 26 février et le 20 avril 2020.

Les « jeunes » patients avaient entre 18 et 45 ans.

 

Ont été inclus 2868 patients dont 321 (11,2%) étaient âgés de 18 à 45 ans. En comparaison avec les patients de plus de 45 ans, les patients jeunes avaient plus fréquemment un IMC>35 kg/m² mais présentaient moins souvent une hypertension, un diabète ou une dyslipidémie.

Sans surprise, le critère primaire d’évaluation qui associait transfert en réanimation et/ou décès intra-hospitalier était plus fréquent chez les patients âgés (30,7% vs 16,8%, p<0,001). Le taux de transfert en réanimation était similaire entre les patients jeunes et les patients plus âgés mais le taux de mortalité intra-hospitalière était plus élevé chez les patients âgés.

Plus de complications cardiovasculaires inflammatoires chez les jeunes

Concernant les complications cardiovasculaires (critère secondaire), les complications inflammatoires étaient plus fréquentes chez les sujets jeunes, l’insuffisance cardiaque aiguë moins fréquente et l’incidence des complications thrombotiques était similaire entre les deux tranches d’âge.

Plus précisément, l’incidence des complications cardiovasculaires inflammatoires était plus élevée chez les 18-45 ans :

  • myocardite : 2,5% vs 0,6%, p=0,002
  • péricardite : 2,2% vs 0,5%, p=0,003

L’insuffisance cardiaque aigüe est survenue moins fréquemment chez les 18-45 ans : 0,9% vs 7,2%, p<0,001.

Les taux de complications thrombotiques n’étaient pas significativement différents entre les deux tranches d’âge :

  • Syndrome coronarien aigu : 0,3% vs 1,4%, p=0,175
  • AVC : 0,3% vs 0,8%, p=0,502
  • Embolie pulmonaire : 5% vs 3,5 %, p=0,251
L’impact cardiovasculaire de la Covid-19 semble particulier dans cette population jeune en comparaison avec les patients plus âgés. Antonin Trimaille
 

« Bien que les patients jeunes semblent avoir un meilleur pronostic que les patients âgés, l’impact cardiovasculaire de la Covid-19 semble particulier dans cette population jeune en comparaison avec les patients plus âgés, davantage de complications inflammatoires (péricardites et myocardites), moins d’insuffisance cardiaque et un taux similaire de complications thrombotiques », a conclu le Dr Trimaille.

Insuffisance cardiaque : la Dapagliflozine reçoit une AMM européenne

Aude Lecrubier

24 novembre 2020

 

France — La dapagliflozine (FORXIGA®, AstraZeneca) a reçu une autorisation de mise sur le marché européenne pour le traitement de l’insuffisance cardiaque chronique symptomatique à fraction d’éjection réduite. Il s’agit du premier inhibiteur de SGLT2 à être autorisé dans cette indication.

Jusqu’ici, la dapagliflozine était uniquement disponible comme antidiabétique en Europe (depuis le 1eravril 2020 en France).

Une extension d’indication

Le 15 octobre 2020, l’EMA avait adopté un avis positif recommandant l’extension d’indication de la dapagliflozine dans l’insuffisance cardiaque. La Commission Européenne a donc entériné l’avis de l’agence européenne.

 

La dapagliflozine a désormais plusieurs indications :

  • dans le diabète de type 2 chez l’adulte insuffisamment contrôlé en complément d’un régime alimentaire et de l’exercice.
    • en monothérapie lorsque la metformine est considérée comme inappropriée en raison d’une intolérance.
    • en complément d’autres médicaments pour le traitement du diabète de type 2.
  • dans le diabète de type 1 chez l’adulte insuffisamment contrôlé en complément de l’insuline chez les patients ayant un IMC ≥ 27 kg / m2, lorsque l’insuline seule ne permet pas un contrôle glycémique adéquat malgré une insulinothérapie optimale.
  • chez l’adulte pour le traitement de l’insuffisance cardiaque chronique symptomatique avec une fraction d’éjection réduite.

Suite aux résultats de DAPA-HF

L’AMM repose sur les résultats de l’étude de phase 3 internationale DAPA-HF publiés dans le JAMA . Ils ont montré que la dapagliflozine diminuait l’aggravation de l’insuffisance cardiaque et la mortalité cardiovasculaire chez des sujets souffrant d’insuffisance cardiaque avec fraction d’éjection diminuée qu’ils soient diabétiques ou non diabétiques. Les bénéfices cardiovasculaires de la dapagliflozine chez les non-diabétiques se sont révélés être de la même ampleur quel que soit le niveau d’HbA1c.

Parmi les 4744 patients inclus (n=2373 sous dapagliflozine, n=2371 sous placebo) dont 55% ne souffraient pas de diabète, le critère composite principal d’évaluation (aggravation de l’insuffisance cardiaque ou décès d’origine cardiovasculaire) est survenu :

  • Chez 20,0% des sujets diabétiques du bras dapagliflozine et 25,5% des sujets diabétiques du bras placebo.
  • Chez 13,2% des sujets non diabétiques du bras dapagliflozine et 17,7% des sujets non diabétiques du bras placebo.

« Ces médicaments [ISGLT2] vont devenir le traitement standard de l’insuffisance cardiaque. Désormais, il reposera sur 4 piliers, les inhibiteurs de la néprilysine, les bétabloquants, les antagonistes de l’aldostérone et maintenant les inhibiteurs de SGLT2 », indiquait récemment le Pr Faiez Zannad (professeur de thérapeutique et cardiologie, Centre d’Investigation Clinique Inserm, Université de Lorraine, CHU Nancy) dans nos colonnes. Des médicaments efficaces et d’utilisation simple, selon le cardiologue : « Notons que ces médicaments sont donnés en une seule dose, sans qu’une adaptation de dose ne soit nécessaire, et qu’il n’y a pas de problèmes d’insuffisance rénale aiguë, d’hyperkaliémie, d’hypotension qui sont les trois causes majeures pour lesquels beaucoup de patients ne reçoivent pas de bloqueurs du système rénine-angiotensine. Nous pensons que ces médicaments vont être plus faciles à manipuler ».

COVID-19: un rôle de plus en plus prégnant pour la vitamine D

Stéphanie Lavaud

2 décembre 2020

 

France – Les effets bénéfiques non osseux de la vitamine D, largement explorés ces dernières années dans différentes pathologies, s’étendent-ils à la maladie Covid ? Différentes études apportent des éléments solides, sans qu’il soit possible de l’établir définitivement à ce stade.

En attendant les résultats de l’essai clinique randomisé CoVitTrial piloté par l’équipe du Pr Cédric Annweiler au CHU d’Angers – attendus dans les semaines qui viennent et qui feront peut-être de la vitamine un traitement du Covid-19 –, deux études observationnelles françaises publiées récemment chez les personnes âgées par cette même équipe sont en faveur d’un rôle positif de cette hormone stéroïde [1,2].

Nous détaillons les résultats obtenus et les mécanismes sous-jacents potentiels avec le Pr Cédric Annweiler, l’investigateur principal et responsable du département gériatrie du CHU d’Angers, qui prône pour une reconnaissance du rôle potentiel de la vitamine D dans le Covid et chez les personnes âgées, déjà souligné par l’Académie de Médecine (voir encadré). Et ce, alors que l’Angleterre a décidé d’une supplémenter en vitamine D 2,2 millions de personnes âgées fragiles cet hiver.

Des formes moins sévères de Covid-19 et une meilleure survie

Deux études observationnelles françaises récentes sont venues appuyer l’intérêt de la vitamine D chez les personnes âgées atteintes de Covid. La première a été menée dans le service de gériatrie du CHU d’Angers chez des personnes âgées hospitalisées pour Covid-19. L’étude a porté sur 77 patients de 88 ans en moyenne séparés en 3 groupes. Dans un groupe, les patients étaient supplémentés au long cours, de façon régulière avec de la vitamine D. Le deuxième groupe de patients a reçu un bolus de vitamine D au moment de diagnostic. Ils ont été comparés à des patients qui n’ont pas reçu du tout de vitamine D.

 

Dans le groupe régulièrement supplémenté par la vitamine D, 93,1% des patients atteints du Covid-19 ont survécu au 14ème jour comparé à 81,2% dans le groupe de malades « rechargés » par un bolus au moment du diagnostic (p = 0,33). Le groupe non traité présentait, lui, une mortalité plus importante avec 68,7% de survivants (p = 0,02).

« Cette étude a permis de conclure qu’une supplémentation régulière par vitamine D (sous forme de bolus mensuel ou trimestriel, et ce pendant l’année précédant l’hospitalisation) était associée à des formes moins sévères de Covid-19 et à une meilleure survie à 14 jours. Chez les personnes qui n’ont reçu un bolus qu’au moment du diagnostic, seule une tendance (à une meilleure survie) a été observée mais sans atteindre la significativité, peut-être en raison de la puissance insuffisante de l’étude » commente le Pr Annweiler.

« Ces résultats donnent le sentiment qu’une imprégnation au long cours par la vitamine D pourrait renforcer l’organisme et le rendre plus résistant. Encore faut-il que l’imprégnation soit satisfaisante au moment de l’infection – une hypothèse appuyée par les résultats d’une deuxième étude que nous avons menée » ajoute-t-il.

Cette deuxième étude a été conduite en EHPAD chez soixante-six résidents atteints du Covid-19 tous régulièrement supplémentés en vitamine D. Parmi eux, un groupe de patients supplémentés en vitamine D3 au cours du mois précédant le diagnostic (n = 57) a été comparé à un «groupe témoin» ayant reçu de la vitamine D deux ou trois mois avant leur infection (n = 9). Les deux groupes étaient comparables en âge (88 ans en moyenne), pour la gravité du COVID-19 et l’utilisation de médicaments Covid-19 associés. L’ensemble des patients a été suivi sur 36 jours.

Les résultats de suivi ont montré que 82,5% des participants du groupe récemment supplémenté ont survécu au COVID-19, contre seulement 44,4% dans le groupe supplémenté à distance de l’infection (p = 0,023). « Là encore, la supplémentation par la vitamine D3 était associée chez les personnes âgées fragiles à une maladie COVID-19 moins sévère et à un meilleur taux de survie, commente le Pr Annweiler.

Mais cette étude apporte une information supplémentaire en termes de temporalité en montrant que les personnes âgées fragiles qui ont reçu de la vitamine D au cours du mois qui a précédé leur contamination avaient une bien meilleure survie que celles qui avaient reçu leur dose de vitamine D dans les 2/3 mois précédant la survenue de l’infection. Comme si, là encore, l’imprégnation en vitamine D favorisée par la prise récente de supplément juste avant l’infection créait un terrain favorable pour lutter contre les formes graves de Covid ».

Ces résultats donnent le sentiment qu’une imprégnation au long cours par la vitamine D pourrait renforcer l’organisme et le rendre plus résistant Pr Cédric Annweiler

Les résultats de CoVitTrial attendus prochainement

Mais quid des personnes âgées infectées par le Covid-19 qui n’ont jamais reçu de supplémentation en vitamine D avant l’infection ? Sont-elles susceptibles de bénéficier d’un « shoot » de vitamine D à leur entrée à l’hôpital ? C’est là tout l’enjeu de CoVitTrial. Cet essai clinique randomisé piloté par le Pr Annweiler au CHU d’Angers vise à comparer depuis avril dernier l’effet sur la survie à 14 jours d’une forte dose de vitamine D (400 000 unités) à celui d’une dose standard de 50 000 unités, donnée immédiatement après le diagnostic Covid. L’étude porte sur les formes graves et inclut des patients de plus de 65 ans oxygéno-dépendants ou de plus de 75 ans. « Sur les 10 centres participants, nous avons déjà inclus 180 personnes sur les 260 prévues, les résultats sont attendus dans les prochaines semaines. »

Quatre modes d’action potentiels

Mais comment expliquer les effets potentiellement bénéfiques de cette substance, qui n’a de vitamine que le nom ? « On oublie souvent qu’il s’agit en réalité d’une hormone stéroïde et on a longtemps cantonné ses effets à la régulation du métabolisme phospho-calcique avec la prévention des fractures osseuses, explique le gériatre. En fait on sait depuis 15 ans qu’il existe de nombreux effets dits non-osseux touchant des cibles très larges dans l’organisme. Plusieurs d’entre eux sont susceptibles de nous intéresser dans le cadre du Covid, ce qui explique que l’on y a pensé très vite ».

 

Plus précisément, quatre modes d’action sont envisagés. « Le premier, très important, serait lié à une action sur le système rénine angiotensine. On sait aujourd’hui que le mode d’entrée du SARS-CoV-2 passe par l’enzyme de conversion de l’angiotensine 2 (ACE2), qui perturbe le système rénine-angiotensine aboutissant aux formes graves de Covid, via l’orage cytokinique, explique le Pr Annweiler. En théorie, en influant sur ce système dérégulé, la vitamine D pourrait aider à éviter une partie de ces formes graves de Covid ».

 

Autre piste d’explication : dans les infections respiratoires aiguës, la vitamine D a une action de régulation de l’immunité et notamment de l’inflammation, en modifiant la production de différentes protéines et cytokines. « Elle augmente la production de cytokines anti-inflammatoires et elle diminue la production de cytokines pro-inflammatoires, ce qui aboutit à un effet anti-inflammatoire ».

 

Un autre rôle de la vitamine D qui peut être intéressant ici, continue le gériatre, c’est la régulation des jonctions serrées entre les cellules qui permet d’augmenter l’imperméabilité aux agents extérieurs. Renforcé, ce mécanisme empêcherait, ici, le virus d’entrer en profondeur dans l’organisme et d’atteindre les tissus cibles.

Enfin, le quatrième effet « qui nous paraît important même s’il est indirect, c’est que les facteurs de risque de carence en vitamine D, mais aussi les maladies chroniques qui l’accompagnent (comme le cancer, le diabète, l’hypertension, certaines cardiopathies, etc), sont très semblables aux facteurs de risque de forme grave de Covid. La vitamine D pourrait donc avoir un effet bénéfique en luttant contre la fragilité de l’hôte à ces facteurs de sévérité du Covid ».

 

En clair, « il ne s’agit à ce stade que de modèles théoriques qui, tous à la fois, sont susceptibles d’expliquer nos résultats aujourd’hui » résume-t-il.

Huile de foie de morue

Sur la base des travaux de l’équipe du Pr Cédric Annweiler et d’autres chercheurs, des pays voisins ont décidé de distribuer, sans attendre et très largement, de la vitamine D à leur population. « C’est le cas de l’Ecosse et de l’Angleterre, où plusieurs millions de personnes âgées fragiles vont se voir administrer de la vitamine D pendant 4 mois, en partant du principe que c’est peu onéreux, facilement accessible, sans risque, avec potentiellement des effets positifs sur le Covid, mais de toute façon sur la santé des personnes âgées » considère le Pr Annweiler.

 

En Norvège, il a été observé que les personnes qui prenaient de l’huile de foie de morue – qui contient essentiellement de la vitamine D – faisaient moins de Covid et des Covid moins graves. « Ils font donc les mêmes observations que nous, à très grande échelle, et sont, de fait, en train de lancer une vaste étude sur 70 000 personnes avec l’objectif de préciser l’effet de l’huile de foie de morue versus placebo sur la prévention du Covid ».

 

Vitamine D : que disent à ce jour les recommandations françaises ?

Dans un communiqué daté  du 22 mai 2020, l’Académie de Médecine préconise :

  • de doser rapidement le taux de vitamine D sérique (c’est-à-dire la 25 OHD) chez les personnes âgées de plus de 60 ans atteintes de Covid-19, et d’administrer, en cas de carence, une dose de charge de 50 000 à 100 000 UI qui pourrait contribuer à limiter les complications respiratoires ;
  • d’apporter une supplémentation en vitamine D de 800 à 1000 UI/jour chez les personnes âgées de moins de 60 ans dès la confirmation du diagnostic de Covid-19.

Les autres recommandations en matière de vitamine D chez l’adulte sont celles du GRIO (Groupe de recherche et d’information sur les ostéoporoses), qui depuis 2011, recommande de supplémenter, sans dosage préalable, toutes les personnes âgées de > 65 ans et plus, et en particulier les plus âgées et les plus dépendantes , et celles de la SFGG (Société Française de Gériatrie et Gérontologie) qui recommande de supplémenter toute personne âgée résidant en EHPAD [4].

Des anomalies myocardiques chez certaines femmes enceintes atteintes de COVID-19 sévère

Marylinn Larkin

9 novembre 2020

 
 

New York, Etats-Unis — Des chercheurs américains ont noté une augmentation des biomarqueurs cardiaques chez certaines femmes enceintes souffrant de la maladie Covid-19. La signification de ces augmentations n’est pas évidente mais les experts suggèrent d’accroitre la surveillance pendant et après la grossesse.

« Actuellement, nous savons que de nombreux biomarqueurs peuvent être anormaux chez certaines femmes enceintes ayant la maladie Covid-19, tels ceux de l’inflammation mais également les marqueurs cardiaques et ceux de la thrombose », a précisé le Dr Sarah Pachtman Shetty (Northwell Health Lenox Hill Hospital à New York City), principale investigatrice de cette nouvelle étude à Reuters Health.

Il est encore difficile de savoir si les praticiens doivent doser les marqueurs cardiaques « sans connaitre les réelles conséquences d’un taux anormal sur la santé de ces patientes » dit-elle. « Cependant, cette information pourrait servir à la surveillance, notamment guider une décision pour des tests ultérieurs ou une imagerie cardiaque ».

Néanmoins, poursuit-elle, « quand une atteinte cardiaque est suspectée chez une femme enceinte [qu’elle souffre ou non de la maladie Covid-19], s’il existe des symptômes évocateurs, ou des anomalies sur l’ECG par exemple, les biomarqueurs tels le BNP et les troponines cardiaques,  doivent être contrôlés comme chez tout un chacun puisque les résultats influencent la prise en charge ultérieure ».

Cette information pourrait servir à la surveillance…guider une décision pour des tests ultérieurs ou une imagerie cardiaque  Dr Sarah Pachtman Shetty
 

Détails de l’étude

Dans cette nouvelle étude, le Dr Pachtman Shetty et coll. ont analysé les dossiers médicaux de toutes les femmes enceintes, hospitalisées pour Covid-19 dans 7 hôpitaux dans le Northwell Health system en mars-avril, ciblant les 31 femmes (moyenne d’âge 33 ans) qui avaient les critères d’une affection sévère ou critique selon le National Institutes of Health.

Les critères primaires étaient l’augmentation du taux des troponines cardiaques, augmentation du BNP, l’existence d’une bradycardie <60/mn et le nadir du rythme cardiaque maternel.

Dans l’article publié dans l’American Journal of Obstetrics and Gynecology  les marqueurs cardiaques ont été mesurés chez 20 femmes (65%) dont aucune n’avait d’antécédent cardiovasculaire ni hypertension.

Les troponines cardiaques étaient augmentées chez 22% (4/18) d’entre elles et le BNP chez 30% (3/10) quand ces marqueurs ont été mesurés. Quatre femmes ont eu des échocardiogrammes : tous étaient normaux. 

Deux patientes sont décédées : elles avaient un taux de troponine élevé et une d’elles avait aussi un taux de BNP augmenté.

Le nadir du rythme cardiaque s’échelonnait entre 30 et 92 battements/mn et une bradycardie a été constatée chez un tiers des patientes (10/31). La moitié de celles ayant un taux de troponine élevé et les trois-quarts de celles qui avaient un BNP élevé ont eu un épisode de bradycardie pendant l’hospitalisation.

Des limites à l’étude

Cette étude rétrospective comporte de nombreuses limites, selon les auteurs : le faible échantillon, l’hétérogénéité des tests sanguins et le biais dans la sélection de l’imagerie.

 

Le Dr Pachtman relève néanmoins : « on sait peu de choses concernant la prise en charge optimale des patients souffrant d’une atteinte myocardique au cours de la Covid-19, et encore moins quand il existe des conditions associées comme ici la grossesse. L’approche concertée au sein d’une équipe incluant des experts dans chaque domaine est indispensable pour assurer aux patients la meilleure évolution possible ».

 

Que disent L’AHA, et l’ACOG ?

Pour le Dr Diana Wolfe (Albert Einstein College of Medicine/Montefiore Medical Center in New York) : « les recommandations actuelles de l’American Heart Association mentionnent un suivi longitudinal avec un cardiologue chez les femmes ayant des grossesses compliquées. Ces résultats suggèrent qu’il doit en être de même chez les femmes souffrant d’une forme sévère de la Covid-19».

 

« Le bulletin 212 de l’American College  of Obstetricians and Gynecologists   concernant la grossesse et les maladies cardiaques inclut un mémo pour le dépistage des maladies cardiaques,  on suggère son utilisation chez toutes les femmes enceintes » note-t-elle.  « La majorité des femmes dans la cohorte décrite ici seraient déclarées à risque (selon leurs signes vitaux à l’arrivée) imposant la surveillance du BNP et l’évaluation par l’équipe cardio-obstétricale ».

 

Aussi, « actuellement il n’y a pas de protocole pour la prise en charge post partum de ces patientes », ajoute-t-elle. « Cependant, je recommanderais au moins une surveillance étroite pendant les 6 premiers mois ».

 

 

 

Paru initialement sur Medscape.com sous le titre Myocardial Effects Seen in Some Pregnant Women With Severe COVID-19 . Traduit par le Dr Jean-Pierre Usdin.

L’alcoolisation de la veine de Marshall, traitement adjuvant de la FA persistante

Megan Brooks

16 novembre 2020

 

Houston, Texas – Les résultats de l’étude VENUS, montrant le bénéfice d’injections d’alcool dans la veine de Marshall simultanément à l’ablation par cathéter de la fibrillation auriculaire (FA) persistante, viennent d’être publiés.

Ces données initialement présentées au congrès virtuel de l’American College of Cardiology (sessions scientifiques) et World Congress of Cardiology sont publiées dans le JAMA du 27 octobre [1].

Quel rationnel ?

Le résultat de l’ablation par cathéter de la FA persistante est limité, la répétition des procédures est souvent nécessaire. Le tissu nerveux de la veine de Marshall est un déclencheur de FA, il peut être inhibé par infusion rétrograde d’alcool (voir encadré).

 

Combiner l’ablation par cathéter et infusion d’alcool dans la veine de Marshall est une technique de plus en plus utilisée aux Etats Unis, capable d’augmenter les chances de maintien en rythme sinusal, commente le Dr Miguel Valderrábano (Methodist DeBakey Heart and Vascular Center, Houston, Texas), rapporteur de l’étude VENUS, pour the heart.org | Medscape Cardiology.

 « Si vous vous référez aux cas postés sur Twitter, il y a de plus en plus d’opérateurs réalisant cette technique. Nous et d’autres l’utilisons en routine au cours de la première ablation d’une FA persistante » affirme le Dr Valderrábano.

343 patients dans VENUS

L’étude VENUS a été effectuée dans 12 centres aux USA. L’essai a inclus 343 patients (âge moyen 66,5 ans, dont 261 hommes) qui souffraient d’une FA persistante symptomatique (FA durant plus de 7 jours) réfractaire à au moins un antiarythmique.

Les participants ont été répartis au hasard pour ablation par cathéter seul (158 patients) ou par ablation par cathéter associée à un à quatre bolus d’alcool dans la veine de Marshall (185 patients). L’alcoolisation a finalement été possible chez 155 des 185 patients (succès de la procédure 84%).

Le critère primaire était l’absence de FA ou de tachycardie auriculaire d’une durée de plus de 30 secondes au décours de la première procédure, sans prescription d’anti arythmique, aux contrôles des 6ème et 12ème mois.

Ce critère a été recensé chez 49,2% des patients ayant eu l’alcoolisation de la veine de Marshall contre 38% chez ceux qui n’ont pas eu la perfusion d’éthanol. Une différence absolue de 11,2% significative (Risque lié au hasard [HR] 0,63 ; [IC 95% : 0,41-0,97] ; P=0,04)

Quant au retentissement de la FA, un critère secondaire, il est nul à 6 et 12 mois chez 78,3% des patients dans le groupe infusion d’éthanol et chez 67,9% dans le groupe contrôle.

 

L’absence de récidive de FA après d’autres procédures (62,2% vs 53,8% ; P=0,04) et le succès du bloc isthmique mitral (80,6% vs 51,3% ; P<0,001) ont également été améliorés chez les patients qui ont eu l’alcoolisation.

 

De meilleurs résultats pour un taux d’événements indésirables identiques

« La perfusion de la veine de Marshall par l’éthanol n’augmente pas les complications liées à la procédure. Le taux d’événements délétères était superposable dans les deux groupes de patients » mentionnent les auteurs dans leur article.

La complication principale dans le groupe perfusé était une surcharge volémique qui a nécessité l’utilisation de diurétiques chez 10 patients comparés aux 2 patients du groupe témoin.

 

« Comme pour toute nouvelle technique nous devons faire des efforts pour mieux la maîtriser », précise le Dr Valderrábano à theheart.org/Medscape Cardiology.

 

« Si vous la considérez comme une variante de l’angioplastie, [voir encadré], alors c’est une angioplastie facile, mais comme la plupart des rythmologues n’effectuent régulièrement des angioplasties, c’est une procédure en dehors de leur territoire de prédilection » note-t-il.

 

« Le succès de l’intervention sur la veine de Marshall est de 155/185 patients dans l’étude mais il est plus important dans les centres qui en effectuent un nombre important (>90%) Cela suggère que l’expérience améliorera les réussites. Les échecs sont plus en rapport avec l’absence de veine de Marshall » explique-t-il.

 

 

 
La veine de Marshall correspond au reliquat embryonnaire de la veine cave supérieure gauche et se termine dans le sinus coronaire. Sa paroi fibreuse (qui lui vaut aussi le nom de ligament de Marshall) est propice aux déclenchements de FA. Par sa situation au niveau de l’isthme mitral, la veine de Marshall conduit à la pérennisation de flutters auriculaires gauches.Elle est atteinte par cathétérisme du sinus coronaire puis angiographie sélective. La veine est ensuite occluse par un ballonnet, l’alcoolisation effectuée en amont par bolus successifs, si possible à plusieurs niveaux. La veine est ainsi sclérosée, de surcroît l’alcoolisation crée aussi un micro-infarctus atrial gauche.

 

 

 

COVID-19: première greffe des poumons chez un patient gravement atteint

Vincent Richeux

18 novembre 2020

 

Suresnes, France — L’hôpital Foch, situé à Suresnes (Haut-de-Seine), a annoncé avoir réalisé la première greffe pulmonaire sur un patient Covid-19 en France. Alors qu’il ne présentait pas de comorbidités, le malade a développé une « forme gravissime » d’insuffisance respiratoire aiguë ayant conduit à « une destruction quasi complète » de ses deux poumons, précise l’établissement de santé privé dans un communiqué [1].

« Nous travaillons actuellement à définir le profil des patients Covid-19 pouvant bénéficier de ce traitement, qui reste exceptionnel », a indiqué le Pr Édouard Sage du service de chirurgie thoracique et de transplantation pulmonaire de l’hôpital Foch, auprès de Medscape édition française. Le chirurgien s’attend également à voir, à plus ou moins long terme, des anciens patients guéris du Covid-19 avoir besoin d’une greffe après aggravation d’une fibrose pulmonaire.

Un profil type très particulier

Agé de 58 ans, le premier patient à avoir reçu en France une double greffe des poumons a eu « une aggravation foudroyante de son infection à Covid-19 », a-t-il précisé. Après avoir été infecté par le SARS-CoV2, « il a reçu des doses croissantes d’oxygène, a été intubé, puis mis sous ventilation, avant de bénéficier d’une oxygénation par membrane extracorporelle (ECMO). »

 

Malgré tout, l’état du patient n’a montré aucun signe d’amélioration. Après plusieurs semaines sous ECMO dans le service de réanimation du CHU de Lille, la destruction de ses poumons, « sans aucune chance de récupération », a été constatée. Il ne restait plus que l’option de la transplantation, envisageable en l’absence de comorbidités et d’atteintes sur d’autres organes.

Etant donné que le développement d’une forme grave de Covid-19 est souvent associée à la présence de comorbidité (diabète, obésité…) et que l’infection par le SARS-CoV2 a, en général, des répercussions sur les autres organes, « ce profil avec une atteinte pulmonaire isolée » est rare, a souligné le Pr Sage. L’option de la greffe de poumons représente alors « une lueur d’espoir » pour ces patients.

Des examens multiples

Avant de recevoir une greffe, le patient a dû passer par de nombreux examens pour « déceler les potentielles contre-indications qui provoqueraient l’échec de ce programme lourd ». Une anomalie vasculaire a notamment été recherchée au CHU de Lille, avant son transfert à l’hôpital Foch, reconnu pour son expertise dans la transplantation pulmonaire et où des examens complémentaires ont été menés.

L’absence du virus responsable de l’infection a également été confirmée à plusieurs reprises par tests PCR au cours de la prise en charge au CHU de Lille.  Avec ce patient, « on était face aux conséquences engendrées par l’infection virale, après une phase très inflammatoire », qui a eu un effet dévastateur sur la fonction pulmonaire.

L’opération a eu lieu le 1er novembre et s’est parfaitement déroulée, précise l’établissement. Une transplantation des poumons dure en moyenne une dizaine d’heures. Le patient, toujours hospitalisé, se porte bien et nécessite de moins en moins d’assistance respiratoire, a précisé le chirurgien. « Il faut cependant rester prudent, car la récupération d’un patient transplanté pulmonaire est souvent longue et parfois difficile ».

Des greffes pulmonaires ont déjà été réalisées, de manière exceptionnelle, après des complications liées à des infections respiratoires autres que le Covid-19, a précisé le Pr Sage. Mais il s’agit là du premier patient Covid-19 a bénéficier d’un tel traitement. « D’autres patients infectés par le SARS-CoV2 nous ont été proposés, mais la greffe était vouée à l’échec en raison de contre-indications ou de comorbidités. »

Risque de dégradation après guérison

L’équipe du Pr Sage s’attèle désormais à définir le profil type de ces patients Covid, dans un état grave, mais stable, pouvant potentiellement bénéficier d’une greffe pulmonaire. « Un travail rétrospectif est mené pour analyser les données concernant la prise en charge des patients Covid en réanimation, notamment lors de la première vague de l’épidémie. » Il s’agit, par exemple, de déterminer une durée minimale sous ECMO avant d’envisager une greffe.

 

« Des patients de la première vague aurait probablement pu bénéficier d’une greffe, mais nous n’étions pas en condition pour la réaliser », souligne-t-il. La transplantation pulmonaire chez ces malades « restera une option thérapeutique d’exception, très limitée et réservée à des sous-groupes de patients. Mais, à l’avenir, si on peut sauver ainsi 10 ou 15 patients, ce sera déjà cela de gagné. »

 

« On s’attend aussi à avoir, à plus long terme, des candidats à une greffe pulmonaire parmi des patients ayant guéri d’une infection par le SARS-CoV2 », notamment après progression de la fibrose pulmonaire. « Dans certains cas, à la sortie de l’hôpital, les atteintes pulmonaires sont telles qu’elles peuvent potentiellement évoluer vers une insuffisance respiratoire chronique terminale. »

 

Au niveau international, ce sont les médecins chinois qui ont été les premiers, en mars dernier, à réaliser une greffe des poumons après des complications liées au Covid-19 chez une femme sexagénaire. En juin dernier, aux Etats-Unis, c’est une malade du Covid-19, âgée d’une vingtaine d’année, qui a pu bénéficier de cette option. D’autres cas ont été rapportés au Canada ou en Italie.

COVID-19 : quel rôle pour les animaux dans la transmission ? 

France – Les animaux qui nous sont familiers transmettent-ils le SARS-CoV-2 ? A priori, non, mais l’épisode d’abattage massif des visons au Danemark a entrainé un regain d’intérêt pour la question de la propagation du virus au sein de la population animale et de sa transmission à l’homme. L’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation (Anses) vient justement  de mettre à jour son expertise sur la question et confirme que les animaux domestiques et les animaux sauvages ne jouent aucun rôle épidémiologique dans le maintien et la propagation du SARS-CoV-2 en France. Cependant, prévient-elle en référence à l’actualité récente au Danemark, « certaines situations particulières, comme une forte concentration d’animaux réceptifs au SARS-CoV-2, appellent toutefois à la vigilance pour ne pas constituer, à l’avenir, un réservoir animal favorable à la propagation du virus ». Elle conseille, par ailleurs, de respecter les mesures barrières avec l’animal, en cas d’infection au Covid-19 (voir encadré ci-dessous).

L’Anses recommande aux personnes atteintes par la maladie Covid-19 d’éviter tout contact étroit avec les animaux, « sans pour autant compromettre leur bien-être ». Lorsque le contact ne peut être évité (soins aux animaux par exemple), il leur est recommandé de porter un masque et de se laver les mains avant et après le contact avec les animaux.

En s’appuyant sur les données disponibles dans la littérature, l’Anses a classé les animaux selon leur réceptivité au SARS-CoV-2, à savoir la capacité d’une espèce animale à héberger le virus sans forcément développer de symptômes, et leur sensibilité, soit la capacité de l’espèce animale à exprimer des signes cliniques et/ou des lésions dues au virus.

Poulets, dindes, canards, bovins et porcs

Aucune infection expérimentale n’a pour le moment montré que les  poulets, les dindes et les canards étaient réceptifs ou sensibles au SARS-CoV-2. Par ailleurs, aucune donnée d’infection naturelle n’a été enregistrée à ce jour.

Concernant les bovins et les porcs,  des études complémentaires s’avèrent nécessaires pour confirmer ou infirmer leur réceptivité au SARS-CoV-2 mais les études publiées montrent que ces animaux n’y sont pas sensibles. En ce qui concerne les animaux d’élevage,  représentent-ils un risque pour l’Homme ?

Chiens et lapins

Chiens et lapins  sont réceptifs au SARS-CoV-2, en revanche, « très peu de chiens ont développé des signes cliniques en condition naturelle au regard des niveaux d’exposition au virus pourtant très élevés (des milliers de personnes infectés par la COVID-19 ont été en contact étroit avec leur chien) » écrit l’Anses. Quant au lapin, les infections expérimentales tendent à montrer la présence de lésions dues au virus, mais celles-ci nécessitent d’être confirmées.

Chats, furets, hamsters, visons…

Il en va différemment des chats, hamsters, furets et autres visons qui ont une réceptivité et une sensibilité au SARS- CoV-2 établies.

Les chats  sont réceptifs et sensibles au SARS- CoV-2 avec une transmission intra-espèce, c’est-à-dire entre individus d’une même espèce, avérée. Fait rassurant pour l’humain, « il n’existe à ce jour pas de données scientifiques mettant en évidence une transmission du SARS-CoV-2 depuis le chat vers une autre espèce ». En revanche, le chat peut s’infecter par le SARS-CoV-2 « dans un contexte de forte pression virale » et « par contacts étroits avec leurs propriétaires atteints par la Covid-19 ».

Les furets et hamsters  sont réceptifs et sensibles au virus SARS-CoV-2, avec une transmission intra-espèce avérée. Cependant, il n’existe à ce stade pas de données scientifiques montrant une transmission du SARS-CoV-2 depuis ces animaux vers d’autres espèces, ni d’infection naturelle.

Concernant le vison , « les données d’infections naturelles rapportées aux Pays-Bas, au Danemark, en Espagne et aux États-Unis montrent que cette espèce est réceptive et sensible au SARS-CoV-2, avec une transmission intra-espèce avérée et inter-espèce présumée » souligne l’Agence. Mais « si les évènements survenus aux Pays-Bas et plus récemment au Danemark, sont en faveur d’une transmission-retour du virus à partir des visons infectés vers les humains », l’Anses précise toutefois que ces évènements sont « vraisemblablement à relier au contexte de forte pression virale due à une densité élevée de la population animale au sein de ces élevages ». On rappellera que le  Danemark a abattu plus de 15 millions d’animaux après qu’une mutation a été retrouvée.

Ont participé à la rédaction des articles : Anne-Gaelle Moulun, Véronique Duquéroy, Aude Lecrubier, Marcia Frelick, Stéphanie Lavaud