COVID-19 : un quart des personnes perdraient leurs anticorps en moins de 3 mois

Peter Russell

2 novembre 2020

 

Londres, Royaume-Uni—Alors que vendredi soir, le dernier avis du Conseil scientifique indiquait : «  l’immunité en population va mettre de nombreux mois à monter de façon significative et commencer à ralentir la rapidité de la circulation du virus en population générale », une étude en cours menée par le Collège Impérial de Londres[1] montre que les anticorps contre le virus SARS-CoV-2 disparaissent souvent en quelques semaines, en particulier chez les personnes asymptomatiques et les plus de 75 ans.

D’après ces résultats publiés en pré-print sur le site MedRxiv, la proportion de personnes testées positives pour les anticorps COVID-19 a chuté de 26,5% sur une période de 3 mois entre juin et septembre 2020.

L’infection par le SARS-CoV-2 pourrait donc ne conférer qu’une protection limitée contre la réinfection.

Le professeur Paul Elliott, directeur du programme REACT-2 au Collège Impérial de Londres, indique: «Un test positif pour les anticorps ne signifie pas que vous êtes immunisé contre le COVID-19. On ne sait toujours pas quel niveau d’immunité est conféré par les anticorps, ou combien de temps dure cette immunité. »

 

Mais selon les experts, si les résultats suggérent que l’immunité pourrait s’estomper avec le temps, la gravité de la maladie suite à d’autres infections pourrait être réduite.

La prévalence des anticorps a diminué chez tous les adultes

L’analyse a porté sur 365 104 adultes anglais qui ont réalisé un autotest (test de flux latéral/LFA) recherchant les IgG. Les résultats d’un certain nombre de ces autotests ont été confirmés en laboratoire. En tout, 17 576 tests se sont révélés positifs.

En trois mois, la prévalence des anticorps est passée de 6,0% à 4,4%, soit une réduction de 26,5%.

Si toutes les classes d’âge sont concernées, ce sont les plus de 75 ans chez qui le taux de positivité était le plus faible et la baisse des taux d’anticorps la plus élevée.

Entre juin et septembre, la part des personnes de plus de 75 ans dont les AC étaient détectables a diminué de 39 % versus 15 % pour les 18-24 ans.

Les résultats suggèrent aussi que les personnes asymptomatiques sont plus susceptibles de voir leur taux d’anticorps détectables disparaitre plus tôt que celles qui présentent des symptômes. Plus précisément, le taux d’anticorps chez les personnes symptomatiques a diminué de 22,3 % au cours des trois derniers mois versus 64 % chez les personnes asymptomatiques.

Chez les soignants, aucune baisse de la prévalence des anticorps n’a été observée au cours des 3 mois, indiquent les chercheurs.

 

Pour la professeure Helen Ward, l’un des principaux auteurs, il est clair que la proportion de personnes ayant des anticorps diminue avec le temps, « Nous ne savons pas encore si cela exposera ces personnes à un risque de réinfection par le virus mais il est essentiel que chacun continue de suivre les mesures permettant de réduire le risque pour lui-même et pour les autres ».

 

Encore des incertitudes

Commentant ces résultats sur le Science Media Center , Rowland Kao, professeur d’épidémiologie vétérinaire et de science des données à l’Université d’Edimbourg, a averti que si les résultats étaient corrects, « toute stratégie reposant sur l’immunité collective manquerait de crédibilité ».

Cependant, il a ajouté que « si le déclin est substantiel, une part non négligeable de la population conserve néanmoins une certaine réponse immunitaire, plus de 4 mois après le pic de l’épidémie ».

 

Aussi, pour Eleanor Riley, professeure d’immunologie et de maladies infectieuses, également de l’Université d’Edimbourg il est trop tôt pour supposer que l’immunité contre le SARS-CoV-2 ne dure pas, car « l’étude ne porte pas sur les concentrations d’anticorps, la fonction des anticorps ou d’autres aspects de l’immunité tels que l’immunité des lymphocytes T, et ne regarde pas la trajectoire des niveaux d’anticorps chez les mêmes individus au fil du temps. »

 

En outre, elle souligne que les résultats ne signifient pas qu’un vaccin serait inefficace car les vaccins contiennent des adjuvants qui pourraient induire des réponses immunitaires durables, en particulier avec des immunisations multiples.

Ce qui n’est pas clair, c’est à quelle vitesse les niveaux d’anticorps augmenteraient à nouveau si une personne rencontrait le virus SARS-CoV-2 une deuxième fois
 

«Ce qui n’est pas clair, c’est à quelle vitesse les niveaux d’anticorps augmenteraient à nouveau si une personne rencontrait le virus SARS-CoV-2 une deuxième fois. Il est possible qu’ils réagissent encore rapidement et qu’ils aient une maladie plus bénigne ou qu’ils restent protégés grâce à la mémoire immunitaire », a commenté le Dr Alexander Edwards, professeur agrégé en technologie biomédicale à l’Université de Reading.

 

Le ministre de la Santé, Lord Bethell, a déclaré: «Quel que soit le résultat d’un test d’anticorps, tout le monde doit continuer à se conformer aux directives gouvernementales, y compris la distance sociale, l’auto-isolement et le test si vous avez des symptômes, et rappelez-vous toujours: les mains, le visage, l’espace. »

 

Les différents types de réponses immunitaires, en bref

Lorsqu’on est infecté, la première réponse qui se déclenche est la réponse immunitaire innée (macrophages, neutrophiles…) qui est immédiate et qui détruit l’agent infectieux en attendant la réponse adaptative.

Cette dernière est constituée de la réponse cellulaire T/deuxième étape (les  lymphocytes T CD4 et CD8) et de la réponse humorale/troisième étape (les lymphocytes B producteurs d’AC) et elle se développe dans les jours qui suivent l’infection.

La réponse cellulaire T a un rôle majeur dans la défense contre les infections. De manière schématique, les lymphocytes T CD4 aident les lymphocytes B à produire les anticorps pour attaquer et détruire les particules virales, et les lymphocytes T CD8 à détruire directement les cellules infectées.

Après une infection, on peut garder des lymphocytes B et T dits « mémoires ». Comme leur nom l’indique, ils gardent en mémoire l’agent infectieux.  En cas de nouvelle infection, ils sont immédiatement réactivés et conduisent à une réponse spécifique, rapide et efficace.

 AL

 

Cet article a été traduit/adapté de Medscape édition anglaise par Aude Lecrubier.

Les fluoroquinolones augmentent les risques d’atteintes des valves cardiaques

Aude Lecrubier

4 novembre 2020

 

France–  Les antibiotiques de la famille des fluoroquinolones administrés par voie systémique et inhalée sont associés à un risque accru de régurgitation/insuffisance des valves cardiaques, indique une lettre conjointe de l’ANSM, de l’EMA et des laboratoires fabricants, adressée aux professionnels de santé.

Selon une étude épidémiologique récente, il existe un doublement du risque de régurgitation mitrale et aortique chez les patients prenant des fluoroquinolones par voie systémique par rapport aux patients prenant d’autres antibiotiques (amoxicilline ou azithromycine).

Aussi, plusieurs cas médicalement confirmés de régurgitation/insuffisance d’une valve cardiaque ont été rapportés chez des patients recevant des fluoroquinolones, avec un lien de causalité probable ou possible.

« Ces données indiquent que les fluoroquinolones peuvent provoquer une régurgitation/insuffisance des valves cardiaques », souligne la lettre.

 

Quel mécanisme physiopathologique ?

Une étude en laboratoire rapporte que l’exposition à la ciprofloxacine entraine une dégradation du collagène dans les myofibroblastes aortiques provenant de patients atteints de pathologies aortiques, dont la régurgitation aortique.

« Cette observation donne une idée sur la façon dont la dégradation du tissu conjonctif associée aux fluoroquinolones pourrait être liée à la régurgitation/insuffisance des valves cardiaques », indique l’ANSM qui précise que « la dégradation du collagène a également été suggérée dans la survenue des affections des tendons et de l’aorte associées aux fluoroquinolones. »

Quels facteurs de risque ?

Les facteurs qui augmentent le risque de régurgitation/insuffisance des valves cardiaques incluent les maladies congénitales ou préexistantes des valves cardiaques, les affections du tissu conjonctif (par exemple le syndrome de Marfan ou le syndrome d’Ehlers-Danlos), le syndrome de Turner, la maladie de Behçet, l’hypertension artérielle, la polyarthrite rhumatoïde et l’endocardite infectieuse.

« Chez les patients à risque de régurgitation/insuffisance des valves cardiaques, les fluoroquinolones par voie systémique et inhalée ne doivent être utilisées qu’après une évaluation approfondie des bénéfices et des risques et après avoir envisagé d’autres options thérapeutiques », conclut l’ANSM.

Il doit, en outre, être conseillé aux patients de consulter immédiatement un médecin en cas de dyspnée aiguë, d’apparition de palpitations cardiaques ou de développement d’un œdème de l’abdomen ou des membres inférieurs.

Les substances actives concernées en France sont : la ciprofloxacine, la lévofloxacine, la loméfloxacine, la moxifloxacine, la norfloxacine et l’ofloxacine.

Pour rappel, les fluoroquinolones sont des antibiotiques indiqués dans l’Union européenne pour le traitement d’infections bactériennes au cours desquelles le pronostic vital peut être engagé.

 

Dans la mesure où leur utilisation peut entraîner des effets indésirables invalidants, durables et potentiellement irréversibles (risque ayant fait l’objet d’une lettre aux professionnels de santé en avril 2019), l’utilisation des fluoroquinolones est généralement restreinte aux infections pour lesquelles les autres antibiotiques habituellement recommandés sont jugés inappropriés.

 

Les fluoroquinolones ne doivent être utilisées qu’après avoir soigneusement évalué les bénéfices attendus et les risques, notamment celui d’anévrisme et de dissection aortique (risque ayant fait l’objet d’une lettre aux professionnels de santé en novembre 2018).

COVID-19 : des séquelles réelles, mais peu documentées

Serge Cannasse

15 octobre 2020

France – Les médias se sont faits l’écho de publications rapportant la persistance de troubles après la phase aiguë de Covid-19. À la demande de la Direction générale de la santé, le Haut Conseil de la Santé Publique (HCSP) a étudié la littérature parue sur le sujet, dans le but d’aider les praticiens à repérer et traiter les patients concernés. Il avertit d’emblée que les travaux sont trop peu nombreux et le recul insuffisant pour tirer des conclusions générales et valides. Néanmoins, il dresse un état des lieux des pathologies observées, en prenant garde de ne pas affirmer de lien direct avec la maladie Covid-19 et de laisser supposer leurs mécanismes physiopathologiques. Ainsi, pour la gériatrie, il explique qu’il « y a un manque total de données prospectives. » Il signale cependant le lancement de l’étude française COVID-OLD coordonnée par Gaëtan Gavazzi et à laquelle participent de nombreuses études dont celle de Nancy. Elle suivra pendant 1 an l’évolution de la fonctionnalité chez les patients de plus de 70 ans atteints par le SARS-CoV-2.

Manifestations respiratoires

Là aussi, les données sont « limitées ». Les symptômes retrouvés sont un syndrome restrictif et/ou diminution de la DLCO (Capacité de diffusion du monoxyde de carbone – CO), une fibrose. Un travail a montré l’intérêt d’une réhabilitation respiratoire.

Complications cardiaques

Leur prévalence a été estimée entre 7 et 22% des formes graves. Ce sont : atteintes myocardites aiguës ischémiques, arythmie par fibrillation auriculaire, troubles de la conduction, tachyarythmie, fibrillation ventriculaire. 

 

Les patients ayant une pathologie cardiaque antérieure à l’infection par le SARS-CoV-2 sont plus à risque de complication. « C’est pourquoi ils ne doivent pas interrompre leur traitement habituel, en particulier les IEC/ARA2 et leur accès aux soins, éventuellement par téléconsultation, ne doit pas être limité », précise le texte.

Il faut rechercher des séquelles cardiaques chez tous les patients ayant eu une maladie Covid-19 avec manifestations cardiaques quelle qu’en soit la sévérité (au minimum, ECG sur 24 heures, échographie cardiaque, test d’effort et/ou IRM cardiaque).

Une tachycardie est fréquemment rapportée, mais n’est pas associée à un surrisque de décès. 

Troubles secondaires de l’immunité

Certaines ont été rapportées à distance de l’infection à SARS-CoV-2, avec quelques formes graves spécifiques aux enfants (par exemple, un syndrome Kawasaki-like).

Manifestations neurologiques

Par rapport aux manifestations respiratoires, elles semblent bien moins fréquentes, mais elles sont potentiellement nombreuses, notamment encéphalite, encéphalomyélite, syndrome de Guillain-Barré, rhabdomyolyse, avec une fréquence particulièrement élevée d’événements cérébro-vasculaires (62% des troubles post-Covid dans une étude) : ischémie, hémorragie intracérébrale, vascularite du système nerveux central.

Complications neuropsychologiques

Elles sont très fréquemment rapportées, avec des fréquences variant fortement d’une étude à l’autre, selon les pays et les groupes sociaux. Elles semblent favorisées par l’isolement, la quarantaine, l’exercice d’une profession exposant au risque d’infection. Un soutien social est associé à une diminution du risque d’anxiété et/ou de dépression.

 

Complications ORL

Les troubles olfactifs sont fréquents pendant la phase aiguë et peuvent perdurer ensuite, de 1 à plus de 4 semaines, mais les données manquent sur le long terme.

 

Conclusion

Le HCSP formule plusieurs recommandations : standardisation du recueil des données, inclusion dans une cohorte de suivi post-Covid des patients non inclus dans la cohorte French COVID (patients hospitalisés à la phase aiguë), coordination nationale des cohortes existantes.

 

Ce résumé clinique a été publié initialement sur Univadis.fr, membre du réseau Medscape.

Nouvelles recommandations européennes en cardiologie du sport: focus sur les arythmies

Vincent Richeux
6 octobre 2020
Les nouvelles recommandations européennes sur la pratique d’une activité sportive chez les patients atteints de pathologies cardiovasculaires ont été présentées lors du congrès virtuel de la Société européenne de cardiologie (ESC) 2020[1,2]. Dans cette partie sont présentées les directives concernant les cinq arythmies les plus fréquentes et les porteurs de dispositifs cardiaques implantables. Avec les commentaires du Dr Stéphane Doutreleau, cardiologue du sport au CHU de Grenoble-Alpes.
Les dernières recommandations principales de l’ESC en cardiologie du sport dataient de 2005, auxquelles se sont rajoutées deux annexes à partir de 2018. Publiée dans European Heart Journal, cette actualisation concerne à la fois la pratique sportive en compétition et le sport de loisirs.
« Ces recommandations sont dans l’ensemble encore marquées par le manque de données en cardiologie du sport, entre autres dans les troubles du rythme. Il s’agit souvent d’avis d’experts plus que de recommandations basées sur des preuves. En cela, elles restent assez restrictives et parfois éloignées des réalités de la pratique », a commenté le Dr Doutreleau, auprès de Medscape édition française.
Le cardiologue évoque notamment des différences d’interprétation sur certains critères morphologiques à l’échographie ou des exigences sur la fréquence des bilans complets, alors que ceux-ci ne sont pas toujours justifiés et que la multiplication des consultations peut s’avérer inutile. « C’est au cardiologue d’évaluer au cas par cas », estime-t-il.
Davantage de décisions partagées
Dans ces nouvelles recommandations, on peut souligner une incitation plus nette à impliquer le patient dans la prise de décision. C’est ce qu’a notamment rappelé le Dr Hein Heidbuchel (Antwerp University, Antwerp, Belgique), lors de sa présentation virtuelle consacrée à la pratique du sport en cas d’arythmies. « Beaucoup d’aspects ne sont pas encore bien connus dans ce domaine. La décision doit donc être prise en concertation avec le patient ».
« Prendre l’avis du patient en considération est assez nouveau. Cet aspect était déjà présent dans les deux annexes des dernières recommandations, mais il se retrouve ici davantage renforcé. C’est un point important au moment d’émettre un certificat médical de non contre-indication, compte tenu du risque lié à la pratique sportive chez ces patients. La décision doit être partagée », a souligné le Dr Doutreleau.
Pour guider le praticien, le Dr Heidbuchel a également rappelé les trois questions fondamentales qu’il est nécessaire de se poser face à un patient atteint d’arythmies désirant pratiquer un sport: « le risque d’arythmie potentiellement mortelle est-il accru par l’activité?

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Nouvelles recommandations européennes en cardiologie du sport

Le sport n’est plus interdit aux insuffisants cardiaques

Marine Cygler
29 septembre 2020
De nouvelles recommandations en cardiologie du sport ont été présentées au cours du congrès de la Société Européenne de Cardiologie (ESC) . Medscape édition française a décidé de consacrer plusieurs articles à ces nouvelles recommandations. Après un premier article sur les sujets sains avec ou sans facteur de risque sont abordés ici le cas des personnes insuffisantes cardiaques.
« Pour la première fois, il est clairement indiqué qu’on peut parler de sport dans l’insuffisance cardiaque, et pas seulement d’exercice modéré. Le message, qui est nouveau, est que le sport n’est pas interdit a priori » indique le Dr Philippe Meurin, cardiologue (centre de réadaptation cardiaque Les Grands Prés, Villeneuve-Saint-Denis, 77). Avant de nuancer : « Toutefois, il faut rester très prudent car la moyenne d’âge des patients en IC est de 75 ans et que nos patients plus jeunes sont souvent gravement atteints. ».
Pour le spécialiste, il est important de classer les IC selon l’altération ou pas de la fonction systolique. « Quand la fonction systolique est préservée ou modérément altérée, il est possible de faire du sport. C’est intéressant car il y a un nombre conséquent de patients avec une FEVG à 45 % » explique-t-il.
Pour la première fois, il est clairement indiqué qu’on peut parler de sport dans l’insuffisance cardiaque, et pas seulement d’exercice modéré Dr Philippe Meurin

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Recommandations pour la reprise du sport pour les insuffisants cardiaques

Persistance des symptômes de COVID: étude au CHU de Rennes

Stéphanie Lavaud
16 septembre 2020
Poitiers, France – Quelle est la prévalence et le mécanisme des symptômes persistants à distance de l’infection ? Pour mieux comprendre, Lucas Armange, interne dans le service des maladies infectieuses et tropicales du Pr Pierre Tattevin au CHU de Rennes, et ses collègues ont mené une étude sur les patients suivis par une application mise en place dès le début de l’épidémie. Les résultats ont été présentés lors des Journées Nationales d’Infectiologie (JNI) 2020 au Futuroscope de Poitiers [1].
Eclairer les zones d’ombre
« Il y a eu beaucoup de littérature scientifique publiée ces 6 derniers mois à propos du COVID. On connait ses caractéristiques structurelles, on sait comment il se transmet, on sait comment il se présente à la phase initiale de la maladie, qui fait des formes sévères et qui en meurt. Mais il reste des zones d’ombre, et notamment l’évolution à moyen terme des gens qui ont fait un COVID et on est en droit de se demander si ces personnes présenteront à terme des séquelles » a déclaré Lucas Armange en préambule de sa présentation.
« Des articles donnent déjà des indices. Une étude italienne à J60 chez 140 personnes qui ont fait une maladie à COVID montre que plus de 50% des personnes sont fatiguées à J60 et plus de 40% sont dyspnéiques [2]. Et une étude anglaise menée chez 30 patients passés en réanimation et une soixantaine de patients post-hospitalisation indique, elle aussi, que des symptômes persistent entre 4 et 6 semaines post-COVID, avec des chiffres de prévalence assez élevés [2]. Les symptômes persistants les plus fréquents sont la fatigue, la dyspnée et la détresse psychologique ».
D’où l’idée d’étudier la persistance des symptômes à 6 semaines de l’infection et de chercher à comprendre en mettant en place des explorations complémentaires pourquoi les patients restaient symptomatiques.

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Persistance des symptômes de COVID

Cardiopathies congénitales de l’adulte : recommandations ESC 2020

Dr Jean-Pierre Usdin
16 septembre 2020
 Les recommandations européennes pour la prise en charge des maladies cardiaques congénitales de l’adulte n’avaient pas été revisitées depuis dix ans. C’est chose faite. Le nouveau texte a été présenté lors du congrès de l’ESC 2020 [1]. En voici les principaux aspects, commentés pour Medscape édition française par les Drs Magalie Ladouceur, Laurence Iserin et Victor Waldmann , cardiologues à l’Hôpital Européen Georges Pompidou (HEGP, Paris).
Plus d’adultes que d’enfants
Les progrès du dépistage des malformations in utero, la prise en charge très précoce et les traitements endovasculaires, entre autres, permettent désormais à 90% des enfants atteints d’affections cardiaques congénitales d’arriver à l’âge adulte.
Il existe donc aujourd’hui plus d’adultes que d’enfants atteints de maladies cardiaques congénitales.
Toutefois, si de nombreux patients survivent, la majorité d’entre eux ne sont pas pour autant guéris. Ces cardiopathies sont évolutives et des pathologies propres à l’adulte vont se superposer.
Pour ces raisons, la Société Européenne de Cardiologie (ESC) a jugé utile de réactualiser ces recommandations pour la prise en charge des maladies cardiaques congénitales de l’adulte.
Passage à l’âge adulte et complexité de la prise en charge
« Lorsque les patients atteints de maladie cardiaque congénitale approchent de l’âge adulte, ils doivent être transférés en soins « adultes ». Un transfert qui doit être précédé d’une phase de transition préparatoire qui se poursuit à l’âge adulte en fonction des besoins du patient », indiquent les recommandations.
Interrogée par Medscape édition française, le Dr Magalie Ladouceur (HEGP, qui ne fait pas partie des auteurs) insiste sur le fait qu’il faut en effet un programme de transition de l’enfance à l’âge adulte pour préparer les enfants, les parents et… les pédiatres.
« Dès l’âge de 12 ans il faut parler à l’enfant et aborder les questions sur le futur métier, la contraception, la grossesse…les facteurs de risque, le sport, comme cela se fait pour d’autres pathologies congénitales qui atteignent maintenant l’âge adulte : une spécialité à reconnaître en France ».

Retrouvez l’article complet dans ce fichier: Recommendations ESC 2020

Article d’origine complet de l’ESC (en anglais): ehaa554

Les statines associées à une baisse de la mortalité dans l’infection COVID-19 ?

Megan Brooks

4 septembre 2020

Kuala Lumpur, Huddersfield, Royaume-Uni — Le traitement par statine serait associé à une baisse de 30% des évolutions sévères ou mortelles de la maladie Covid-19, selon une méta-analyse de quatre études qui a colligé les données de près de 9000 patients. Les résultats sont parus dans l’édition en ligne de l’American Journal of Cardiology le 11 août.

« Il est peut-être temps que nous nous concentrions sur les statines en tant qu’options thérapeutiques potentielles chez les patients Covid-19 », ont indiqué les auteurs, le Pr Syed Shahzad Hasan (Université de Huddersfield, Royaume-Uni) et Chia Siang Kow (Université de Kuala Lumpur, Malaisie), dans un commentaire envoyé par email à Medscape Medical News.

Des données de moyenne et de bonne qualité

L’analyse a inclus quatre études publiées jusqu’au 27 juillet de cette année. Les études éligibles étaient des études de cohorte ou cas-témoins, les patients recrutés avaient une maladie Covid-19 confirmé et des données disponibles permettant de comparer, après ajustement, le risque de maladie grave et / ou de mortalité parmi les utilisateurs de statines et les non-utilisateurs.

Les quatre études – une de qualité «modérée» et trois de «bonne» qualité – ont inclus un total de 8 990 patients atteints de Covid-19.

Dans l’analyse poolée, le risque de maladie Covid-19 mortelle ou sévère était abaissé de 30 % avec l’utilisation de statines par rapport à la non-utilisation de statines (RR groupé, 0,70; IC à 95%, 0,53 – 0,94).

Ces données contredisent l’idée selon laquelle les statines seraient dangereuses chez les patients atteints de Covid-19, concluent les auteurs.

«Notre méta-analyse a inclus un nombre assez important de patients Covid-19 provenant de quatre études parmi lesquelles trois sont des études à grande échelle qui ont été ajustées pour plusieurs facteurs de confusion potentiels, les résultats peuvent donc être considérés comme fiables », écrivent les Prs Hasan et Kow.

Sur la base de ces résultats, « un traitement par statine d’intensité modérée à élevée est susceptible d’être bénéfique » chez les patients atteints de Covid-19, précisent-ils.

Cependant, ils soulignent que davantage de données issues d’études prospectives seront nécessaires pour étayer  ces résultats et pour déterminer le schéma thérapeutique approprié chez les patients atteints de Covid-19.

Contacté pour un commentaire, le Pr Yibin Wang (David Geffen School of Medicine, Université de Californie, Los Angeles), qui n’a pas participé à l’étude a déclaré: «Il s’agit d’une méta-analyse très simple de quatre études publiées qui rapportaient systématiquement un effet protecteur ou neutre de l’utilisation des statines sur la mortalité ou les complications graves chez les patients Covid-19. »

Bien que la portée de cette méta-analyse soit « assez limitée, la conclusion n’est pas inattendue, car la plupart des analyses cliniques rapportées jusqu’à présent montrent les avantages ou la sécurité de l’utilisation des statines chez les patients Covid-19 », a déclaré le Pr Wang à Medscape Medical News.

Questions en suspens

Bien qu’il n’y ait « presque aucune controverse » sur la sécurité de la poursuite du traitement par statine chez les patients Covid-19, il reste à déterminer si le traitement par statine peut être mis en œuvre comme partie intégrante des soins standards chez les patients Covid-19 quel que soit leur statut lipidique », poursuit le Pr Wang.

«L’utilisation de statines est associée à plusieurs effets bénéfiques comme l’anti-inflammation et la cytoprotection, mais ces effets sont généralement observés avec une utilisation à long terme plutôt qu’une administration à court terme / aiguë. Par conséquent, des études prospectives et des essais randomisés doivent être menés pour tester l’efficacité de l’utilisation des statines pour les patients atteints de Covid-19 présentant des symptômes légers à graves », a-t-il noté.

« Compte tenu de l’excellent profil des statines en termes de coût et de toxicité, il est certainement utile de considérer son utilisation à grande échelle pour la maladie Covid-19 afin de réduire le taux de mortalité global et les complications graves », a conclu le Pr Wang.

Medscape Medical News a joint pour un commentaire le Dr Guillermo Rodriguez-Nava (Département de médecine interne, AMITA Health Saint Francis Hospital, Evanston, Etats-Unis) qui est le premier auteur de l’une des études incluses dans cette méta-analyse. Une étude rétrospective monocentrique qui a montré un ralentissement de la progression de la maladie vers le décès chez les patients âgés atteints de Covid-19 admis en soins intensifs et recevant de l’atorvastatine.

Pour lui, « actuellement, il existe des centaines d’essais cliniques évaluant une grande variété d’agents pharmacologiques pour l’infection Covid-19. Malheureusement, ces essais prennent du temps et nous obtenons des résultats au compte-gouttes ».

«En attendant, les meilleures données disponibles sont observationnelles, et les traitements de l’infection Covid-19 continueront d’évoluer. L’efficacité de l’atorvastatine contre le Covid-19 est toujours à l’étude. Néanmoins, les cliniciens devraient envisager au moins de poursuivre les statines chez les patients atteints de Covid. 19 », a-t-il conseillé.

L’étude n’a pas reçu de financement spécifique. Les Prs Hasan, Kow, Wang et Rodriguez-Nava n’ont révélé aucun lien d’intérêt en rapport avec le sujet.

Cet article a été initialement publié sur Medscape.com sous l’intitulé Statins Linked to Reduced Mortality in COVID-19. Traduit par Aude Lecrubier

Les dilemmes éthiques au cœur de la crise Covid: témoignage du Dr Benjamin Davido

Les dilemmes éthiques au cœur de la crise Covid: témoignage du Dr Benjamin Davido

Véronique Duqueroy

29 juin 2020

Dr Benjamin Davido

France Les médecins français ont été nombreux à témoigner, sur Medscape, des dilemmes éthiques auxquels ils ont été confrontés au cours de leur carrière, mais aussi lors de l’épidémie exceptionnelle de Covid-19 qui a frappé le pays ces derniers mois. En début de crise, le Dr Benjamin Davido, infectiologue à l’hôpital Raymond-Poincaré de Garches et médecin référent de crise Covid-19, s’était exprimé sur les enjeux sanitaires et éthiques. Quelle est la situation aujourd’hui ? Comment le Dr Davido a-t-il vécu, au plus fort de la crise, sur le terrain, les choix qu’il a dû faire pour « sauver ses patients » ? Anticipe-t-il un contrecoup psychologique, pour lui-même ou son équipe ? Une remise en question éthique ? Alors que les cas de contamination sont au plus bas et que la France tente, tant bien que mal, un retour à la normale, sommes-nous prêts à affronter une deuxième vague, voire un nouveau type d’épidémie ? Entretien.

 

Medscape édition française : Fin mars, vous évoquiez le tri des patients , dilemme auquel allaient être confrontés les soignants en cas de saturation des services de réanimation. Qu’en a-t-il été durant la crise ?

Benjamin Davido Heureusement, ce tri ne s’est pas fait, notamment parce que le pays a été confiné. Nous étions certes à un moment extrêmement tendu, en particulier en Île-de-France où au plus fort de la crise nous comptions 1700 malades de réanimation sur 1750 lits. Dans les grands hôpitaux parisiens, forcément, certains ont dû faire des choix, mais je ne crois pas qu’il y a eu de cut-off d’âge ― c’est-à-dire ne pas avoir réanimé les gens âgés de plus de 70-75 ans par exemple. Je ne pense pas que cela se soit produit.

Dans notre enquête sur l’Impact du Covid sur l’éthique médicale, de nombreux médecins déclarent pourtant avoir été témoins d’un tri en fonction de l’âge…

Benjamin Davido Je n’aime pas ce mot « tri ». En tout cas, dans mon hôpital à Garches, nous ne l’avons pas fait. Il faut dire que nous avons l’habitude de réanimer des sujets âgés et des gens avec des handicaps, donc nous avons continué à faire comme avant. Nous n’avons pas eu à faire ces choix, mais nous avons vécu d’autres choses, qui étaient aussi extrêmement dures.

Quel a été, pour vous, le plus difficile durant la phase aigüe de l’épidémie ?

Benjamin Davido Les gens étouffaient littéralement devant nous. Personnellement, je n’avais jamais vécu cela, des patients qui vous supplient : « aidez-moi, je ne veux pas mourir. » Mais nous avons tenu. À un moment donné, nous étions complètement déshumanisés, mais cela fait partie du métier. Donc cela ne m’a pas traumatisé. En fait, le plus horrible pour moi a été d’avoir eu, à plusieurs reprises, le sentiment d’attendre que certains malades de réanimation meurent pour pouvoir « pousser » les miens qui attendaient une place en réanimation.

Pour libérer les places… ?

Benjamin Davido Oui. Je me souviens d’une dame de 60 ans dont il était pour moi impensable qu’elle n’aille pas en réanimation. Nous l’avons maintenue dans le service jusqu’à ce qu’un lit se libère. Nous avons « espéré » qu’un malade décède dans la nuit. C’était terrible de se trouver dans une telle situation et d’en arriver à penser cela.  La pression sur les lits d’hospitalisation en réanimation était telle qu’elle a obligé à effectuer quotidiennement des transferts (hors de notre hôpital et/ou en province). Le nombre de patients à admettre en médecine augmentait chaque jour, nous obligeant à ouvrir des lits au-delà de nos capacités d’accueil. Il fallait envisager un aval possible en réanimation en cas d’aggravation, qui rendait compliqué l’équation entre les malades entrant et sortant. Ces moments où on attendait que les uns partent pour pouvoir trouver une place pour les nouveaux patients resteront gravé dans ma mémoire. Quand un patient décédait, on se disait « c’est triste, mais c’est fini. On aura tout tenté, nous aurons le dessus sur le Covid-19 avec le prochain malade ».

Y-a-t’il d’autres patients qui vous ont particulièrement marqué ?

Benjamin Davido Avant que l’on puisse faire ces fameux transferts, j’avais un patient qui avait exactement mon âge et que j’avais moi-même brancardé. Il était vraiment limite, quasi suffocant, et j’avais appelé le réanimateur pour lui dire : « il ne va pas passer la nuit si l’on ne fait rien d’ici là ». Il m’a répondu : « écoute, on a un patient qui est dialysé, il ne va pas tenir longtemps. » Et je me rappelle avoir été soulagé quand j’ai appris que le malade en réanimation était mort et avait libéré un lit pour un jeune en réanimation. C’est extrêmement violent. Avec l’interne, j’ai monté mon patient en réanimation, il a été intubé devant mes yeux, dans le lit (nous n’avons même pas eu le temps de le télescoper sur un lit de réa)… Au même moment, nous avons croisé l’autre patient, avec un drap de mort sur la tête.  C’était effroyable.  On se débrouillait pour que les malades ne s’aperçoivent pas de ce chassé-croisé entre les morts et les vivants.

Retrouvez l’interview complète  en cliquant sur le lien ci-dessous:

Les dilemmes éthiques au cœur de la crise Covid19

 

Le poids de la migraine avec aura sur le risque cardiovasculaire

Le poids de la migraine avec aura sur le risque cardiovasculaire

Agnès Lara

30 juin 2020

 

Etats-Unis — La migraine et en particulier la migraine avec aura a été associée à une augmentation du risque cardiovasculaire (RCV) et reconnue comme facteur de risque CV à part entière. Elle a également été associée à d’autres facteurs de risque CV comme l’hypertension artérielle, le tabagisme, l’hyperlipidémie et la composition corporelle. Mais quel est le poids de la migraine avec aura sur le risque CV par rapport à d’autres facteurs de risque CV ? C’est la question que s’est posée une équipe germano-américaine qui vient de publier ses résultats dans le JAMA[1].

À partir de données collectées auprès de femmes professionnelles de santé américaines âgées d’au moins 45 ans à l’inclusion et sans maladie cardiovasculaire (cohorte Women’s Health Study ), les chercheurs ont comparé les taux d’incidence d’événements cardiovasculaires majeurs (ECVM: infarctus du myocarde, AVC ou décès d’origine cardiovasculaire) chez les femmes souffrant de migraine avec aura, par rapport à  ceux observés chez des femmes avec migraine sans aura ou sans migraine, ainsi que par rapport à des femmes sans migraine mais ayant différents facteurs de risque cardiovasculaires. Les données concernant les migraines ou les facteurs de risque cardiovasculaire ont été auto-rapportées par les femmes.

Un facteur de risque CV très important

  • Sur près de 28 000 femmes incluses dans la cohorte (âge moyen 54,7 ans), 1435 (5,2%) avaient eu des migraines avec aura et parmi les autres, 2177 (7,8%) avaient eu des migraines sans aura dans l’année.
  • Au cours d’une durée moyenne de suivi de 22,6 ans, le taux d’incidence d’ECVM rapportés a été de 3,36 pour 1000 personnes-années chez les femmes ayant des migraines avec aura et de 2,11 pour 1.000 personnes-années pour les femmes sans migraine ou ayant des migraines sans aura.
  • Par rapport aux femmes ayant d’autres facteurs de risque CV, les femmes ayant des migraines avec aura avaient un taux d’incidence d’ECVM significativement plus élevé que les femmes obèses  (2,29 pour 1000 personnes-années), celles ayant des taux de triglycérides élevés (2,67) ou encore celles ayant des taux bas de HDL (2,63).
  • La différence n’était pas significative lorsque les femmes atteintes de migraine avec aura étaient comparées à celles ayant une pression artérielle systolique élevée, des taux de cholestérol total élevés ou des antécédents familiaux d’infarctus du myocarde.
  • En revanche, les taux d’incidence d’ECVM étaient significativement plus élevés chez les femmes ayant un diabète (5,76 pour 1.000 personnes-années) ou un tabagisme actif (4,29 pour 1.000 personnes-années) par rapport aux femmes ayant une migraine avec aura.
 

En conclusion, selon l’étude du JAMA, au sein d’une cohorte de femmes professionnelles de santé âgées d’au moins 45 ans et sans maladies cardiovasculaires à l’inclusion, la migraine avec aura est associée à un taux d’incidence d’événements cardiovasculaires majeurs supérieur à celui associé à l’obésité ou à une hyperlipidémie.

Ce taux d’incidence est aussi similaire à celui associé à l’hypertension artérielle ou à un cholestérol total élevé, mais inférieur à celui associé au diabète ou à un tabagisme actif.

Ces résultats demandent maintenant à être confirmés dans d’autres types de population avant de pouvoir être généralisés.